La récente initiative de l’essayiste Gabrielle Siry-Houari et du député LFI Antoine Léaument visant à saisir le procureur de la République à l’encontre de Pierre Manent est emblématique d’une époque qui confond le débat d’idées avec la volonté d’exclure, de disqualifier, voire de criminaliser l’expression d’une pensée dissidente.

Lors de son passage dans l’émission Le Club Le Figaro le 5 décembre 2024, Pierre Manent a exprimé une inquiétude que beaucoup de nos concitoyens partagent, sur les difficultés d’intégration et de civilité dans une France profondément travaillée par les fractures identitaires et culturelles.
Dans un propos mesuré, en lien direct avec les réalités sociales, il constatait que l’augmentation de la population de culture musulmane pouvait poser des questions de coexistence civique et d’unité nationale. Rien qui ne sorte, fondamentalement, du périmètre de la réflexion politique légitime.
Pour autant, Gabrielle Siry-Houari qualifie les propos de Pierre Manent de « diffamation à caractère raciste envers les personnes de confession musulmane » (article 32 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) alors qu’Antoine Léaument les qualifie de « provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence » (article 24 de la loi de 1881).
Ni injure, ni appel à la violence, ni imputation de faits précis : aucune des qualifications retenues ne tient sérieusement d’un point de vue juridique. Ce signalement s’inscrit dans une logique de disqualification morale, non dans une démarche de justice. C’est pourquoi le collectif Justitia, en la personne de Maître Aymeric de Lamotte, s’est chargé de la défense du philosophe.
La tentative de judiciarisation des propos de Pierre Manent relève une nouvelle fois d’une instrumentalisation politique du droit.
Que des élus instrumentalisent l’article 40 du Code de procédure pénale pour faire pression sur une pensée critique est préoccupant.
La liberté d’expression, surtout sur des sujets aussi sensibles que l’intégration et l’identité, mérite d’être protégée, non intimidée.